Un email pourrait être la clé de l’affaire. Anne-Sophie Martin est journaliste. Dans un livre, sorti pour la rentrée, « Le Disparu », elle retrace cinq ans d’enquête sur l’affaire Xavier Dupont de Ligonnès, soupçonné d’avoir assassiné sa femme et ses quatre enfants, avant de les enterrer sous la terrasse. Elle y révèle l’existence d’un email, envoyé à deux amis, un an avant la mort de sa famille.
Deux hypothèses, « si ça tourne mal »
Si ça tourne mal, je n’ai que deux solutions, me foutre en l’air avec ma voiture ou foutre le feu à la baraque quand tout le monde dort (…) Post-scriptum : je suis très sérieux, lucide et sous l’emprise d’aucune drogue ni d’aucun alcool », aurait-il écrit.
Cinq ans après, l’affaire déchaîne toujours les passions. Xavier Dupont de Ligonnès n’a pas été retrouvé. Aucune trace d’ADN, pas d’arme retrouvée, même pas un aveu suffisant. Seuls quelques indices et documents subsistent.
Essentiel. Dans un livre, Le Disparu, la journaliste Anne-Sophie Martin révèle l’existence d’un courriel envoyé par Xavier Dupont de Ligonnès à deux amis moins d’un an avant la mort de sa famille. Dans ce message qui pourrait confirmer la culpabilité du père, ce dernier, alors criblé de dettes et en échec professionnel, écrit qu’« une décision définitive est à prendre : suicide seul ou collectif ».
Le scénario indiqué dans le courriel est macabre. « Si ça tourne mal, je n’ai que deux solutions, me foutre en l’air avec ma voiture ou foutre le feu à la baraque quand tout le monde dort (…) Post-scriptum : je suis très sérieux, lucide et sous l’emprise d’aucune drogue ni d’aucun alcool », détaille-t-il.
Où est passé Xavier Dupont de Ligonnès ? S’est-il bel et bien donné la mort ? A-t-il changé d’identité et refait sa vie à l’étranger ? Autant de questions qui hantent encore les enquêteurs cinq ans après la macabre découverte sous la terrasse de son pavillon de Nantes : les cinq corps de sa famille, ceux d’Agnès Dupont de Ligonnès et de ses quatre enfants, Arthur, Thomas, Anne et Benoît, et ceux des deux labradors de la famille. Le père, introuvable, est toujours apparu comme le suspect numéro 1 même si aucun élément probant, comme des empreintes ADN, ne permet de l’affirmer.
Ce nouvel indice pourrait laisser à penser que le père de famille s’est donné la mort après avoir tué les siens. Sauf que Xavier Dupont de Ligonnès a été filmé dans le Var pour la dernière fois le 15 avril 2011, plus de dix jours après la mort de sa famille. En pièce jointe du mail envoyé à ses amis, il laisse ses dispositions à prendre en cas d’« accident mortel » ou d’« accident domestique ».
« Je souhaite enfin que, même après enquête de police, on ne puisse jamais laisser croire à mes parents, frères et sœurs, que ces accidents ont été volontairement provoqués par moi (même si les preuves sont formelles) », écrit-il.
Ses proches ne croyaient pas à la thèse du suicide
Pour l’auteure, les faits et documents constituent « un parfait passage à l’acte ». Cette dernière s’appuie sur des lettres, SMS et le témoignage des proches de l’homme. « J’ai été sidérée en réalisant qu’une personne sur deux, dans l’entourage de la famille, ne croyait pas à la thèse du suicide », confie-t-elle, au Figaro.
On ne sait pas exactement dans quel ordre se sont déroulés les faits, on a simplement des éléments d’enquête très précis. On sait que Xavier Dupont de Ligonnès a fait remettre en état le fusil de son père, dont le calibre, 22 long rifle, correspond aux balles retrouvées dans les corps, et on a les tickets des achats réalisés par le tueur présumé : de la chaux, des grands sacs-poubelle… Il y aurait assez pour le mettre en examen, bien sûr », précise-t-elle.
Il pourrait être toujours vivant
Cinq ans après, on ne sait toujours pas si le criminel est mort ou vivant. La journaliste penche plutôt pour la seconde option. L’homme de cinquante ans, qui avait « pas mal bourlingué dans sa jeunesse et reste très débrouillard », était bilingue en anglais, selon son entourage, et à l’aise en espagnol, rapporte Le Figaro. Les témoignages ont ensuite afflué et laissé croire qu’il avait été aperçu une fois à Rome (Italie), une autre à Dieppe (Seine-Maritime), à Bastia (Haute-Corse) ou Turin. Des annonces finalement révélées infondées.
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> Le point sur l’enquête :
Selon les experts, Xavier Dupont de Ligonnès aurait tué sa femme et ses quatre enfants, dans la nuit du 3 au 4 avril 2011. Les corps ne seront retrouvés que deux semaines plus tard, le 21 avril 2011. Une semaine avant, le 15 avril, une image de l’assassin apparaît, dans le Var. Sa voiture avait été retrouvée, abandonnée, sur une route du département. Il aurait donc continué son périple à pied. Peut-être même changé d’identité, voire passé la frontière. Selon l’enquête, l’homme serait resté au moins une semaine chez lui, afin d’enterrer les cadavres et de dissimuler le meurtre. En parallèle, il aurait écrit à une douzaine de proches, pour leur expliquer un départ précipité aux États-Unis, au service de la police des stupéfiants américaine, pour « faire tomber un réseau de trafiquants ». Xavier Dupont de Ligonnès aurait été jusqu’à répondre aux SMS et mails, à la place de ses enfants et de sa femme, pour rassurer leurs amis. Au milieu d’un mail, une phrase intéresse particulièrement les enquêteurs : « inutile de s’occuper des gravats et autres bazars entassés sous la terrasse, c’était là quand nous sommes arrivés ». Terrasse sous laquelle seront retrouvés les cinq corps humains et de leurs deux labradors.